Bicentenaire de Louis Pasteur : l’héritage du père du vaccin à l’ère du Covid

Il y a 200 ans environ (le 27 décembre 1822) naissait Louis Pasteur, l’un des scientifiques français les plus connus dans le monde. De quel héritage scientifique a-t-il la paternité ? En quoi ses découvertes ont encore aujourd’hui un rôle dans nos politiques de santé publique ?
Avec
• Erik Orsenna Écrivain, membre de l’Académie française
• Pascale Cossart Chercheuse française, spécialiste en microbiologie cellulaire
• Olivier Schwartz Directeur scientifique de l’Institut Pasteur, directeur de l’Unité Virus et immunité de l’institut Pasteur
Insatiable chercheur, Louis Pasteur, dont on fête aujourd’hui le bicentenaire, démontre que les microbes sont partout : dans l’eau, dans l’air, sur les objets, sur la peau… et que certains engendrent des maladies. Il passe alors sa vie à mettre la science au service de la société, faisant de la vaccination un principe élémentaire de santé publique. 200 ans après sa naissance, et plus de deux ans après la découverte du covid-19, quel est le legs du travail de Louis Pasteur dans nos politique de santé publique ?

Revenant sur la pandémie de Covid-19, Olivier Schwartz affirme que l’“on assiste à une nouvelle épidémie depuis un an avec l’apparition du variant Omicron qui a infecté 90 à 95% de la population. Tout le monde maintenant a, soit été vacciné, soit été infecté. Et le virus continue à évoluer, et à essayer de se faufiler partout “. Le directeur scientifique insiste ainsi sur le fait qu’“à chaque nouvelle vague, de nouveaux variants apparaissent, et les anticorps ne fonctionnent plus. Il faut en créer de nouveaux et espérer qu’au fil du temps ces vagues se transformeront en vagues toujours plus petites”.

Pascale Cossart explique que l’enjeu aujourd’hui est d’essayer “de repérer l’arrivée de nouvelles pandémies. À l’heure actuelle, la grande question est de se préparer : “on était préparés à guérir, à soigner, à faire des vaccins, mais maintenant il faut se préparer à guetter les premiers signes de pandémies futures”. La chercheuse insiste : “il faut qu’au niveau de la planète, tout le monde soit prêt et qu’on communique les uns avec les autres. La circulation de l’information doit être encore plus importante qu’elle ne l’a été jusqu’à présent”, et en particulier durant l’épidémie de Covid-19.

L’héritage de Louis Pasteur

Comme le souligne Pascale Cossart : “Pasteur a un peu introduit les microbes dans la société. Avant lui, on ne connaissait pas les microbes. Il a réussi à montrer qu’ils étaient partout, qu’ils participaient à l’alimentation, à l’agriculture, et au cycle de la vie*. Il s’est occupé de domaines de plus en plus grands, et a joui d’une réputation qui de nationale est devenue planétaire. Il a envoyé ses collaborateurs dans le monde entier. De fait, il y a très peu de gens qui ont réussi à autant révolutionner la société*”.

Pour Olivier Schwartz également : “les intuitions, les hypothèses sont très importantes dans le domaine des sciences. Quand Louis Pasteur a mis au point le vaccin contre la rage, qui est elle, causée par un virus, il n’avait même pas vu ce virus, il ne connaissait pas son existence, il n’en avait pas les moyens, et il a quand même mis au point le vaccin. Et c’est cette combinaison d’intuitions et d’hypothèses qui permet de progresser d’un point de vue scientifique”. Le directeur de l’Institut Pasteur continue : “l’esprit Pasteur reste vivace et nous avons toujours cette volonté, cette curiosité dans tous les domaines scientifiques. Cette approche multidimensionnelle fait la force de nos recherches actuelles, avec à la fois des questions de connaissances et d’applications pour la santé publique”.

Des progrès perpétuels dans la science

Sur la question d’un vaccin contre le VIH, Olivier Schwartz explique : “toute recherche contre un virus, contre un microbe bénéficie aux autres. Les autres recherches ont été utiles pour l’élaboration des vaccins Covid et maintenant la stratégie par exemple d’utiliser les ARN messager en tant que vaccin contre le VIH est en cours d’analyse. Il y a des essais qui sont réalisés”. Pour le directeur, cela correspond à un esprit pasteurien : “le rôle des scientifiques est de partager les connaissances, d’être conscient des limites des observations, d’être transparent et d’éduquer en quelque sorte la population pour lutter contre l’obscurantisme. Non seulement il faut progresser, faire des expériences, mais partager ces informations, les limites de ce qu’on étudie, de ce qu’on découvre”. Erik Orsenna déplore quant à lui : “on n’arrête pas d’être des enfants gâtés sans prévision et sans courage” vis-à-vis de ce que l’on ne connaît pas ou de ce que l’on connaît mal. “Les scientifiques souvent restent entre eux, et souvent disent qu’ils ne veulent pas transmettre. Il faudrait bannir le mot vulgarisation, et le remplacer par celui de popularisation” car, pour l’écrivain, rien de ce qui qui fait l’objet d’une transmission, d’un passage de relais ne doit être vu comme vulgaire, exprimant l’idée que n’importe qui s’enrichit en approfondissant son savoir scientifique.

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