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Les secrets des optimistes pour rester positif

Ils ont réussi à traverser 2020 non pas en ronchonnant mais plutôt avec le sourire. Quand d’autres broient du noir, ils préfèrent voir la vie du bon côté, quoi qu’il arrive. Cinq optimistes confient ce qui leur permet d’entretenir la dynamique au quotidien.
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On dit souvent qu’il existe deux catégories de personnes : ceux qui voient le verre à moitié vide et les autres, qui préfèrent le voir à moitié plein. Philippe, Florence, Anaïs, Éric et Théo font partie du deuxième camp. Ils ont ce trait de caractère que beaucoup leur envient face à la crise que nous traversons : l’optimisme. Soit «une disposition d’esprit qui consiste à voir le bon côté des choses, à trouver que tout est pour le mieux, à ne pas s’inquiéter des embarras présents et à bien augurer de l’avenir», selon la définition du dictionnaire. Mais en pratique, comment ont-ils pu surmonter l’année 2020 ? Et comment amorcent-ils celle qui nous attend ? Tour d’horizon de leurs astuces à appliquer au quotidien.

Anaïs, 31 ans, responsable communication dans la restauration. En mars dernier, à l’approche du confinement, alors que certains se rongeaient les ongles d’angoisse, Anaïs, elle, planifiait son exil dans une maison en bord de plage en Normandie. «C’était une évidence que je n’allais pas subir cette situation, je voulais être actrice d’un moment positif», se souvient-elle. Aujourd’hui, alors que son secteur subit de plein fouet la crise, la trentenaire, qui a la chance de continuer à travailler, refuse de céder aux sirènes de «l’hystérie ambiante» et préfère au contraire prendre de la hauteur sur la situation. «C’est l’occasion de faire du sport à la maison, de moins manger, moins boire et puis en toute franchise, je me dis que dans un tout autre contexte, avec le froid du mois de janvier, je n’aurais pas eu ce besoin vital de sortir chaque soir», concède-t-elle.
Dans le cas où l’ennui la guette, elle se concocte des activités atypiques, dans le respect des règles sanitaires : une randonnée-vélo de 45 km ou encore une baignade en combinaison dans une mer à 16°C. «J’ai cette superstition propre à mes origines algériennes qui me pousse à croire que la pensée négative n’entraîne rien de bon, avoue-t-elle. Alors je préfère toujours favoriser le positif pour créer un cercle vertueux.»

Rien ne nourrit plus notre optimisme qu’avoir la sensation de progresser

Créer des rituels et tenir un journal
Florence Servan-Schreiber, 57 ans, journaliste et auteure de Bloum : écrire pour s’épanouir et kiffer (Ed. Marabout). Depuis de nombreuses années, Florence Servan-Schreiber applique dans son quotidien et ceux de ses lecteurs, les principes de la psychologie positive, cette «science du bonheur» visant à révéler notre potentiel intérieur. La journaliste en est convaincue : l’être humain est capable d’influer sur sa vie et ainsi sur son optimisme. À commencer par la création de rituels. «Avoir des rendez-vous réguliers qui nous font du bien est une source inestimable d’énergie pour faire face à tout», indique-t-elle. Un engagement dans un domaine artistique, la cuisine d’un repas savoureux ou une conversation avec des amis, apportent selon elle une légèreté rassurante.
Et l’impact serait double s’il s’agit d’une activité nouvelle. «Rien ne nourrit plus notre optimisme qu’avoir la sensation de progresser, affirme-t-elle. Pour cela, il faut se jeter à l’eau, se confronter à quelque chose dont on sait très peu pour se sentir construire une nouvelle compétence.» Suivre une formation, se frotter à des tutos d’origami ou encore s’inscrire à un atelier d’écriture par exemple. La journaliste plaide d’ailleurs en faveur de l’écriture intime dans son dernier ouvrage. «En tenant un journal très bref mais quotidien de nos emmerdes, doutes et succès, il devient facile et rassurant de voir à quel point des difficultés qui nous semblaient insurmontables ont été dominées et pour la plupart déjà oubliées», note-t-elle.

Observer la météo et écouter des témoignages
Théo, 36 ans, architecte. Aussi longtemps qu’il s’en souvienne, Théo a toujours aimé prendre la lumière, au sens propre. Petit, il se faisait souvent remonter les bretelles quand il avait la tête dans les nuages ou quand il avait le nez collé contre la fenêtre de la classe. «On n’a aucun contrôle sur la météo, en revanche on sait qu’après la pluie vient le beau temps. Ça peut paraître tout bête mais j’ai toujours trouvé cette perspective très rassurante», confie-t-il.

Quand le ciel est gris et que les températures chutent, l’architecte cherche le rayon de soleil auprès de ses proches, «les plus souriants et les plus drôles bien sûr» et le cas échéant, dans des témoignages audio inspirants. Son podcast favori ? Les Pieds sur Terre, diffusé sur France Culture. «Une femme surdouée qui écoute les arbres parler, un homme illettré qui apprend à lire à 40 ans, des gamins de banlieue qui construisent des cabanes dans la forêt de Bondy… Ce sont des récits de vie qui te redonnent un peu foi en l’humain, rapporte-t-il. Mes préférés sont ceux réalisés par la journaliste Élise Andrieu. Il n’y a pas mieux comme remède à la mélancolie.»
Ce n’est pas une tragédie mais une épreuve collective que l’on va surmonter
PHILIPPE GABILLIET, PROFESSEUR DE PSYCHOLOGIE SOCIALE
Alimenter l’humour et guetter les innovations
Philippe Gabilliet, 62 ans, professeur de psychologie sociale, porte-parole de La Ligue des Optimistes de France et auteur d’Éloge de l’optimisme (Éd. J’ai Lu). En regardant dans le rétro de 2020, Philippe Gabilliet peine à trouver de quoi se plaindre. «Je n’ai aucune raison d’être pessimiste, je peux continuer de travailler à distance, je profite davantage de ma femme et mes deux filles et j’ai même du temps pour regarder des séries à la télé», résume-t-il. Face à une situation d’adversité qui nous limite dans l’action, cet «optimiste né» fait l’éloge des petits plaisirs. Le sien ? Appeler des amis chaque semaine à heure fixe pour prendre l’apéro via Zoom et se partager des blagues, des vidéos humoristiques autour du thème de la pandémie. «Plus que jamais, c’est important de dédramatiser la situation, souligne-t-il. Ce n’est pas une tragédie mais une épreuve collective que l’on va surmonter.»
Selon lui, on peut aussi jeter un œil dans ses livres d’histoire pour relativiser. «On nous a démontré à de multiples reprises que toute crise majeure débouche sur un rebond ou une relance très forte», raconte-t-il. Pour nourrir ce raisonnement, attention en revanche à ne pas trop compulser les informations, parfois trop anxiogènes. Le professeur de psychologie sociale aime consulter des médias mettant en valeur des «nouveautés qui apportent de l’espoir», à l’instar des éditions du Libé des solutions, par le journal Libération. «Cela participe à alimenter ma croyance sans borne en l’intelligence humaine, sa capacité d’innovation, d’invention et d’adaptation aux difficultés», conclut-il.
Lire, lire (et relire ses livres de chevet)
Éric Antoine, 44 ans, magicien, animateur télé et auteur de Magic Optimystic (Ed. Robert Laffont). Alors que les salles de théâtre et de spectacles ont baissé momentanément le rideau, Éric Antoine a mis au point un show interactif et dématérialisé, Connexions, pour continuer de faire rire et rêver ses spectateurs. La faute (ou la chance) à sa curiosité insatiable, «un moteur de l’optimisme», selon lui. «Se questionner, ne pas aller constamment chercher le ticket de la confirmation pessimiste, participe d’une certaine manière à regarder le monde autrement, à se soigner et ainsi à développer sa créativité», observe-t-il.
Les livres participent aussi à cette meilleure perception des événements qui nous entoure. Pendant le confinement, Éric Antoine s’est replongé pour la troisième fois dans le célèbre roman et deuxième prix Goncourt de Romain Gary, La Vie devant soi. «Une histoire d’amour filial magnifique entre une vieille prostituée juive et un petit garçon arabe», résume le magicien. D’après lui, l’auteur y aborde tout ce qui fait «la légèreté et les difficultés de l’humanité». Il ajoute : «Cela fait partie des livres qui t’accompagnent toute ta vie et qui t’éclairent un peu plus à chaque lecture sur toi».

Source : Tiphaine Honnet du Figaro