“La Terre est plate”. Oui, d’une certaine manière, la terre se présente à nous dans une courbure quasi nulle. Cette illusion induit un courant de platistes à remettre en cause ce que des millénaires de savoirs ont démontré.
Car, dès l’Antiquité, la rondeur de la terre est déjà trouvée et au Moyen-âge, contrairement au mythe, ce savoir ne s’est pas perdu, comme nous le raconte Catherine Hofmann : “Dès le haut Moyen Âge, les connaissances antiques sur le monde, sur la Terre, ont été transmises par des auteurs comme Martianus Capella ou bien Macrobe. Ils ont été copiés et glosés. Au XIIᵉ siècle, de nouveaux savants se sont penchés sur ces œuvres et ont produit de nouveaux traités, qui ont été souvent illustrés de schémas explicatifs. Et donc, on sait dès le haut Moyen Âge que la Terre est une sphère, que l’on décrit comme une pelote, comme une balle”.
Des observations célestes d’Aristote à la mesure terrestre d’Eratosthène, l’idée de sphère et de globe s’est donc imposée rationnellement pour décrire la forme du monde. Et, au-delà de la Terre, ce même modèle a guidé l’édifice des cosmogonies, pour percer l’énigme des cieux et des astres qui le peuplent.
Un long chemin, semé d’obstacles idéologiques, que la Révolution copernicienne incarne si bien par les prouesses de ses protagonistes. Un chemin, semé également de querelles et d’enjeux scientifiques, comme lorsqu’en 1687, Isaac Newton affirme que la Terre prend à peu près la forme d’un ellipsoïde de révolution aplati aux pôles et renflé à l’équateur. S’en suivra des débats entre scientifiques européens, pour finalement se rendre compte que Newton avait raison, comme nous l’explique, l’historien des sciences, Denis Savoie : “Effectivement, la Terre est légèrement aplatie aux pôles. C’est ce qu’on appelle un ellipsoïde. Grosso modo, il faut attendre l’ère des satellites artificiels après les années 1950 pour que l’on mesure vraiment la forme de la terre, qui a des bosses, qui a des creux et avec la notion de géoïde qui remonte à Gauss. Aujourd’hui on connaît parfaitement, au centimètre près pratiquement la forme de notre planète”.
Ce récit de découvertes, est aujourd’hui bien documenté grâce au travail des historiens des sciences, des vulgarisateurs, archivistes et astronomes. Au pied d’une lunette, devant une carte ancienne ou un globe terrestre, ils nous projettent dans le passé pour revivre une odyssée qui se poursuit aujourd’hui encore.
• Alain Riazuelo, astrophysicien à l’Institut d’Astrophysique de Paris, co-auteur avec Etienne Klein de "Pourquoi la Terre est ronde", aux éditions Humensis.
• Denis Savoie, historien des sciences à Universciences - Palais de la Découverte & Cité des Sciences et de l’Industrie, chercheur associé au laboratoire Système de référence temps espace de l’Observatoire de Paris, auteur d’Une histoire des cadrans solaires en Occident(éditions Les Belles Lettres);et de "Cosmographie" avec Thomas Haessig.
• Catherine Hofmann, conservatrice à la BnF, commissaire de l’exposition Le Monde en Sphère, 2019 et co-auteure de l'ouvrage "Le Monde en sphères", BnF, 2019.
• Yaël Nazé, astrophysicienne FNRS, au sein du Groupe d’Astrophysique des Hautes Energies de l’Institut d’Astrophysique et de Géophysique de l’Université de Liège, auteure de L'Astronomie de l'étrange, Belin, 2021.